Biography
Catherine Poulin est née et a grandi à Québec, a étudié la littérature à Trois-Rivières et vit à Montréal depuis plusieurs années. Elle est l’autrice de trois livres de poésie, Entomographie (aux éditions Le lézard amoureux), Nos attentats domiciles (aux éditions de l’Hexagone) et Tailler les mammifères (aux éditions d’Art le Sabord). Elle fait partie du groupe d’exploration musicale et poétique Fracas les sangs!, est membre du comité de lecture de la maison d’édition Mémoire d’encrier et travaille également à l’accompagnement littéraire et éditorial en poésie pour cette même maison. Sa poésie fouille le langage, le questionne à bras le corps, retourne chaque mot comme autant de pierres précieuses. Ses lieux de réflexion investissent autant les allées d'une épicerie, les sentiers d'une forêt que les poussières d'un chantier de rénovation. Son écriture tente de montrer le souffle se trouvant entre l’équilibre et sa perte.
Micro-interview
J’ai des souvenirs plutôt flous de lecture de poèmes au primaire, ils résident surtout dans les fables de La Fontaine et des chansons de Félix Leclerc. Au secondaire, et ce que je suis en mesure d’extirper de ma mémoire, Nelligan, Baudelaire, Prévert, Rimbaud. J’ai eu un enseignant de français au secondaire qui adorait Anne Hébert et Nicole Brossard et je crois bien qu’elles furent mes premières découvertes d’une poésie écrite par des femmes, le programme enseignait surtout des œuvres écrites par des hommes.
Au primaire, j’adorais lorsque nous devions écrire des acrostiches ou des poèmes pour la Fête des mères, par exemple. Je crois que mon amour des mots, le langage comme matériau créatif artistique, est clairement né là. Mais j’ai probablement commencé à écrire des poèmes, et ce, plus consciemment vers la fin du secondaire.
J’ignore quand on commence à se concevoir comme poète, après trois, quatre, dix livres, une vie à écrire de la poésie? Lorsque l’on me pose la question « qu’est-ce que tu fais dans la vie? », je réponds désormais que je suis poète, entre autres, mais un peu comme s’il s’agissait ici plus d’une posture de résistance que d’une conception pleinement assumée de moi en tant que poète.
Pour moi, le travail des poètes en est un de fouissage, linguistique et émotif. Creuser, remuer les choses, nommer ce que l’on tait, les tremblements sous-cutanés, donner voix aux fractures, aux brèches, ce qui se trouve entre deux états ou ce qui pousse les corps et les têtes d'un état à un autre. Tenter de faire voir autrement, de faire ressentir autrement. Par exemple, prenons cette personne assise sur cette chaise, qu’est-ce que nous racontent sa posture, ses mains ballantes, cette jambe surexcitée, le modèle de la chaise, l’usure du tissu à cet endroit précis? Je travaille beaucoup cette zone floue se trouvant entre l’équilibre et sa perte, l’être humain étant constamment en train de repositionner son corps, lire ici le corps comme l'être, pour retrouver son point d'ancrage, avant la foulure, la cassure. La fragilité et la violence des mouvements équilibristes, que se trouve-t-il entre les deux?
Aujourd'hui, demain ce serait peut-être autre chose, je choisirais « si je ne touche pas… » de Marie-André Gill. Pour le rythme, l’essoufflement, pour la fracture, la nature et l’urbanité (les éléments humains du décor, les bancs, les lampadaires, les craques de trottoirs), pour la confrontation entre les états.